Repos hebdomadaire : la fin d’une incertitude juridique ?

repos hebdomadaire

Le repos hebdomadaire constitue un droit fondamental pour les salariés. Sa mise en œuvre a cependant soulevé une question d’interprétation pendant plusieurs décennies : doit-il être accordé impérativement après six jours de travail consécutifs, ou simplement au cours de chaque semaine civile ? Par un arrêt du 13 novembre 2025, la Cour de cassation apporte une clarification attendue, mettant fin à des années d’incertitude et confirmant une position de longue date de l’administration.

Le cadre légal du repos hebdomadaire

Le Code du travail encadre strictement le temps de repos des salariés. L’article L. 3132-1 dispose qu’il est interdit de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine. En conséquence, l’article L. 3132-2 établit que tout salarié a droit à un repos hebdomadaire d’une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives, auxquelles s’ajoutent les onze heures consécutives de repos quotidien, portant le repos minimal à 35 heures consécutives.

Par principe, ce repos hebdomadaire est accordé le dimanche (article L. 3132-3 du Code du travail), même si des dérogations existent pour certains secteurs ou activités, prévues aux articles L. 3132-12 et suivants.

Semaine civile ou jours consécutifs : l’enjeu de l’interprétation

La formulation plus de six jours par semaine a alimenté un débat sur la période de référence à considérer. Deux interprétations étaient en jeu :

  • Faut-il raisonner sur une base calendaire, interdisant de ce fait de faire travailler un salarié plus de six jours consécutifs ?
  • Ou bien faut-il se fonder sur la semaine civile (du lundi 0 heure au dimanche 24 heures), ce qui permettrait alors à un salarié de travailler plus de six jours d’affilée, pourvu qu’un repos hebdomadaire soit pris au cours de chaque semaine civile ?

L’exemple souvent cité est celui d’un salarié qui prend son repos un lundi, puis travaille sans interruption jusqu’au samedi de la semaine suivante. Il aurait ainsi travaillé douze jours consécutifs. Cependant, il aurait bien bénéficié d’un repos hebdomadaire au cours de la première semaine civile (le lundi) et d’un autre au cours de la deuxième semaine civile (le dimanche).

La position historique de l’administration

Le Ministère du travail et la Direction des relations du travail (DRT) avaient déjà exprimé leur préférence pour l’interprétation de la semaine civile. Dès 1976 et 1981, des réponses ministérielles avaient indiqué que la semaine devait s’entendre comme la semaine civile, et qu’il n’était pas interdit d’occuper un salarié « plus de six jours de suite » tant que chaque semaine civile comportait un jour de repos. Une circulaire de la DRT du 7 octobre 1992 a confirmé cette orientation, précisant que la semaine commençait le lundi à 0 heure et se terminait le dimanche à 24 heures.

L’affaire portée devant la Cour de cassation

La question a été soumise à la Cour de cassation suite à une affaire concernant un directeur des ventes. Ce salarié avait pris acte de la rupture de son contrat, reprochant notamment à son employeur le non-respect du droit au repos hebdomadaire. Il avait travaillé onze jours consécutifs (du 3 au 13 avril 2018) puis douze jours consécutifs (du 3 au 14 septembre 2018), sans bénéficier d’un jour de repos après six jours de travail. Après un échec devant le conseil de prud’hommes, le salarié avait obtenu gain de cause en appel, la cour considérant la prise d’acte comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employeur s’est alors pourvu en cassation.

La Cour de cassation tranche en faveur de la semaine civile

Dans son arrêt du 13 novembre 2025 (n° 24-10.733), la Cour de cassation a censuré la décision d’appel. Elle a rappelé que l’article L. 3132-1 du Code du travail impose que chaque semaine civile comporte un repos de 24 heures consécutives, complété par le repos quotidien, mais sans exiger que cette période minimale de repos hebdomadaire soit accordée au plus tard le jour qui suit une période de six jours de travail consécutifs.

La haute juridiction confirme ainsi que le repos hebdomadaire doit intervenir au cours de chaque semaine civile, mais qu’il n’est pas interdit de faire travailler un salarié plus de six jours consécutifs, notamment lorsque des dérogations au repos dominical sont appliquées.

Une décision conforme au droit européen

Pour étayer sa décision, la Cour de cassation s’est également appuyée sur la jurisprudence européenne. L’article 5 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 prévoit que tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de sept jours, d’une période minimale de repos sans interruption de vingt-quatre heures.

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), dans un arrêt du 9 novembre 2017 (aff. C-306/16), avait précisé qu’il n’était pas exigé que le repos soit accordé au plus tard le jour qui suit une période de six jours de travail consécutifs, mais qu’il soit accordé à l’intérieur de la période de 7 jours, sans en fixer le moment précis. La Cour de cassation s’aligne donc sur cette interprétation, renforçant la cohérence du droit national avec le cadre européen.

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